Conférence annuelle contre l’antisémitisme

Fiers de notre identité ! 

Quelque 120 personnes issues de quinze pays européens ont pris part, les 13 et 14 décembre dernier à Aulnay-sous-Bois, à la conférence annuelle organisée par le département de Lutte contre l’antisémitisme de l’Organisation sioniste mondiale (OSM). L’occasion de dresser le constat de la prégnance de la haine anti juive, mais aussi d’esquisser des stratégies individuelles et collectives pour lui faire pièce.

 À l’heure où la profanation de tombes juives ne soulève plus l’indignation générale, où la justice française écarte d’un revers de main le caractère antisémite du passage à tabac d’un étudiant israélien qui s’est aventuré à parler hébreu dans le métro parisien, où un thuriféraire du terrorisme anti juif prétend au poste de Premier ministre du Royaume-Uni, les participants au séminaire de l’OSM ont choisi de riposter fermement à l’indifférence du plus grand nombre, à la joie mauvaise de ceux que la prospérité juive indispose, ainsi qu’à la peur que peut inspirer, au sein de notre peuple, le climat de judéophobie chronique qui prévaut en Occident comme en Orient. Loin de céder au découragement, les représentants institutionnels et associatifs rassemblés en ce shabbat hivernal ont ainsi partagé leurs expériences, leurs initiatives et pistes de réflexion.

 

Un combat de tous les instants

En ouverture de cette édition 2019, Yaakov Hagoel, vice-président de l’OSM et chef du département organisateur, a rappelé que l’antisémitisme n’était pas seulement le problème des Juifs, mais du monde entier. « Notre responsabilité est d’éduquer nos enfants dans la fierté juive, de renforcer le lien indéfectible qui unit le peuple, la terre et la Torah d’Israël », a déclaré le responsable israélien, avant d’appeler les gouvernements à ne faire preuve d’aucune complaisance à l’égard des actes antisémites, alors même que des Juifs sont tués parce que juifs, y compris aux États-Unis, pays longtemps épargné par cette violence meurtrière.

 

De son côté, Robert Zbili, président de la Fédération des organisations sionistes et du KKL de France, a détaillé les trois avatars de l’antisémitisme actuel, qu’il soit d’extrême-droite, islamique ou encore d’extrême-gauche, mâtiné d’un antisionisme imbibé de bonne conscience prolétarienne. « Les antisionistes ne supportent pas ce qui nous rend fiers : Israël et ses réussites dans tous les domaines ! », a-t-il conclu.

Invitée d’honneur de la session inaugurale, Aliza Bin-Noun, ambassadrice d’Israël en France, a évoqué ses quatre années et demi de mission dans l’Hexagone, marquées par une inquiétante progression de l’antisémitisme, 70 ans après la Shoah. « Aujourd’hui, des internautes se répandent sans aucune retenue sur les réseaux sociaux, et deux femmes ont été dernièrement assassinées en raison de leur appartenance au peuple juif », a déploré la diplomate. Après le discours d’Emmanuel Macron établissant le lien de parenté entre antisionisme et antisémitisme, Aliza Bin-Noun s’est félicitée de l’adoption par l’Assemblée nationale, malgré bien des réticences, d’une résolution en ce sens, à laquelle elle a largement contribué. Pour être non-contraignant, le texte constitue un message politique et pourrait servir de point de référence aux juges en vue de la reconnaissance de crimes et délits antisémites. « Les résolutions et les lois [telles que la loi Avia contre la cyberhaine adoptée en juillet 2019] ne suffiront certes pas à régler le problème, a poursuivi l’oratrice. Il reste beaucoup à faire dans les sphères éducative et médiatique. Mais il ne faut pas perdre notre motivation ! » Au terme de sa mission, Aliza Bin-Noun n’a pas manqué non plus de remercier la communauté juive de France pour sa chaleur et son sionisme.

 

Une pathologie millénaire en mutation permanente

De nombreux intervenants se sont ensuite succédé tout au long de ce shabbat intensif. Joël Mergui, président du Consistoire, a tout d’abord fait remarquer à l’assistance que les huit jours de la fête de Hanoukka prenaient le pas sur l’unique journée de Pourim, qui célèbre pourtant une menace d’extermination déjouée. En effet, c’est l’identité juive, au cœur de la pérennité de notre peuple, que les Grecs séleucides avaient alors mis en péril.

 

Par la suite, le géopolitologue Alexandre del Valle s’est livré à un exposé d’excellente facture sur l’antisémitisme islamique, incarné entre autres par les Frères musulmans et les prétentions califales d’Erdoğan.

 

Le leader sioniste Jacques Kupfer a appelé, à son tour, à se montrer sans faiblesse dans le combat en faveur de la vérité historique et de la défense de l’identité juive, jusque dans nos propres rangs.

 

Pour sa part, Timothée Larribau, fondateur du site rebaptisé « Nations pour Israël », a démonté point par point le mythe du « peuple déicide » à l’origine de l’antisémitisme chrétien, démenti par les Évangiles.

 

Quant au journaliste Michel Gurfinkiel, il a révélé l’ancienneté de la haine antijuive et les influences intellectuelles et idéologiques à l’œuvre dans les médias.

 

Un panel a par ailleurs réuni des représentants juifs d’Europe et du Maroc, venus témoigner de la situation de leurs communautés respectives, du pouvoir de nuisance de BDS dans leurs pays et des contre-attaques qu’ils préconisent pour contrecarrer agressions antisémites.

 

Des raisons d’espérer

En conclusion, Yaakov Hagoel et Moshé Cohen, directeur de l’OSM-France, ont salué l’implication des participants et la richesse des enseignements de cette rencontre internationale.

Rédacteur en chef du journal Israel Hayom, Boaz Bismuth a effectué une synthèse efficace de l’antisémitisme contemporain, fondamentalement polymorphe et jugé légitime pour autant qu’il provienne de la gauche de l’échiquier politique ou de populations jadis colonisées. « Le meilleur moyen de lutter contre l’antisémitisme est d’être fier de son identité », a-t-il lancé, rejoint par Joël Mergui.

En guise de message final, Yaakov Hagoel a relevé les succès tout récemment enregistrés, dont le décret exécutif du président Trump destiné à contrer l’antisémitisme sur les campus, l’écrasante victoire de Boris Johnson contre Jeremy Corbyn aux élections britanniques, voire le sursaut de conscience de l’Unesco contre les clichés anti juifs. Quelques notes d’espoir dans une guerre de longue haleine contre une ignorance, une bêtise et une jalousie immémoriales.